Irène Sadowska Guillon[1]
Resumé
Toshiki Okada, auteur et metteur en scène des plus marquants dans la nouvelle dramaturgie japonaise, inventeur d’une écriture et d’un langage scénique très physique, « dansé », revendique dans son théâtre la notion du réalisme et du quotidien. Il témoigne dans ses pièces de l’état et de la mutation de la société japonaise actuelle dans sa confrontation avec la mondialisation, la crise et la défaillance de son système social et politique. Il aborde cette problématique à travers l’intime et le quotidien de jeunes adultes d’une génération post-prospérité au Japon, désemparés, en perte de repères, découvrant la précarité du travail, l’incertitude de l’avenir et l’effondrement de tout ce qui fondait leurs projets de vie. En relevant les divers aspects du traitement de cette thématique dans les pièces successives de Toshiki Okada, je dégage en même temps l’évolution de leur structure dramatique et des ses expressions scéniques.
Comment s’est élaboré le langage scénique du théâtre d’Okada, un jeu non réaliste apparenté au langage chorégraphique, basé sur la discordance entre le discours et les mouvements corporels, oscillants, répétitifs, évoquant les mouvements clichés des jeunes que l’on voit aussi bien dans les rues de Tokyo qu’ailleurs ? Comment, partant d’une situation intime, individuelle, concrète, par des procédés de variation, de collage, de fragmentation et de simultanéité spatiale et temporelle, Okada donne-t-il une vision « cubiste », multiple, plus abstraite, d’une génération ?
Figure saillante de la nouvelle dramaturgie et de la scène japonaise, Toshiki Okada a créé un théâtre unique, un « théâtre dansé », qui, nourri par Brecht et le courant du « théâtre tranquille » de Oriza Hirata, puise sa matière première dans les rues du Japon d’aujourd’hui. Prenant pour point de mire la jeunesse sans repères, au bord de la rupture, saisie par le prisme du quotidien et de l’intime, Toshiki Okada chronique dans ses pièces la société japonaise actuelle.
L’écriture et la pratique scénique de Toshiki Okada, né en 1973 à Yokohama où il crée en 1997 sa compagnie « Chelfitsch », s’inscrit dans le sillage du nouveau courant du « théâtre tranquille » initié par Oriza Hirata dans les années 1990, revendiquant, en réaction au mouvement des « petits théâtres », la notion du réalisme et du quotidien. Okada y adhère à sa manière, en recourant, comme Hirata, au langage parlé, populaire. Mais il radicalise la démarche de son modèle à travers la recherche d’un jeu « naturel » sur scène et d’une utilisation du langage qui, à la différence des répliques construites et d’une gestuelle servant de support à la parole chez Hirata, est improvisé par les acteurs et dissocié de leur gestuelle.
Toshiki Okada trouve les ressources de son écriture et de sa démarche scénique dans sa propre expérience : les petits métiers qu’il a exercés, et les transcriptions et résumés des entretiens avec les jeunes. D’où son intérêt pour le langage parlé, quotidien, l’argot des jeunes, répétitif, à la logique défaillante, où le propos ne va pas toujours au fond du sujet.
L’expression physique : gestes, attitudes, postures propres à la jeune génération japonaise, lui servent pour élaborer un langage gestuel où les corps évoluent entre le naturel et l’artifice, une sorte de « théâtre dansé ». Le nom de sa compagnie, « Chelfitsch », déformation du mot désignant une certaine infantilisation des jeunes adultes désarçonnés, en rupture avec le système, dont il transpose l’expression verbale et corporelle, recouvre à la fois la démarche et la problématique centrale de son théâtre.
Remarqué dès ses premiers spectacles pour la singularité de son langage scénique, Toshiki Okada est consacré en 2005 par le prestigieux Prix Kishida Drama pour sa pièce Cinq jours en mars. La même année, sa pièce Air Conditioner est finaliste du Prix Toyota de Chorégraphie. Le Prix Kenzaburo Oe pour son recueil de nouvelles The End of the Special Time we Were Allowed, en 2007, contribue à la reconnaissance de Okada comme artiste multiple : homme de théâtre, chorégraphe, écrivain.
Ses spectacles sont invités aujourd’hui dans des théâtres et les grands festivals de plusieurs pays d’Europe et sur d’autres continents. En 2006, il représente le Japon au Stücke 06 / International Literature Project à Berlin et devient directeur de l’édition 2006 / 2007 du Festival Summit au Kamaba Agora Theater à Tokyo.
Ses spectacles Cinq jours en mars et Freetime ont été invités en 2007 au Festival d’Automne à Paris qui, en 2010, l’a réinvité avec ses nouvelles créations, le triptyque Hot Pepper, Air Conditioner, The Farewell Speech et We Are the Undamaged Others. Ce triptyque a été présenté au Centre Dramatique National de Gennevilliers, dirigé par Pascal Rambert, qui, depuis quatre ans, fait découvrir de nouvelles écritures théâtrales, en particulier celles des auteurs japonais comme Oriza Hirata ou Toshiki Okada.
Les pièces de Toshiki Okada témoignent de l’état et de la mutation de la société japonaise actuelle dans sa confrontation avec la mondialisation, la crise et la défaillance de son système social et politique. Cette problématique n’est pas abordée frontalement, mais à travers l’intime et le quotidien des individus d’une génération de post-prospérité du Japon, désarçonnés, découvrant la précarité du travail, l’incertitude de l’avenir, l’effondrement de tout ce qui fondait jusque-là leurs aspirations, leurs projets de vie. Un quotidien autiste dont la routine sécurisante n’isole plus, ne protège plus des conséquences d’événements extérieurs, des séismes économiques et politiques, même si les protagonistes des pièces d’Okada tentent de les neutraliser, de les intégrer comme une normalité.
Dans Cinq jours en mars, il aborde la question de la guerre comme normalité : quel genre de relations psychologiques, physiques, sociales, vivons-nous au moment d’une crise mondiale ? La guerre change-t-elle quelque chose dans nos attitudes et dans nos habitudes ? Alors que la guerre d’Irak éclate (le 20 mars 2003), à Tokyo, deux jeunes, un garçon et une fille, se rencontrent par hasard, s’enferment et font l’amour pendant cinq jours dans une chambre d’hôtel, puis se quittent sans même savoir leurs noms. Cette histoire banale sert à Okada pour une radiographie de la société japonaise.
Elle est racontée à travers une structure extrêmement complexe : discontinuité spatio-temporelle des séquences, entrelacs des faits, des événements, des personnages, tissage des relations et des coïncidences, va-et-vient permanent entre le présent et le passé, entre le dialogue, le monologue et le récit. Les trois acteurs jouent les divers personnages ou deviennent tour à tour le narrateur. Un plateau nu, pas de décor, juste un mur au fond. Le jeu non réaliste qui s’apparente au langage chorégraphique est basé sur la discordance entre le discours et les mouvements corporels, oscillants, balancements répétitifs, une quasi danse évoquant les mouvements clichés des jeunes que l’on voit aussi bien dans les rues de Tokyo qu’ailleurs.
Plusieurs pièces de Toshiki Okada s’articulent sur le thème du travail abordé sous des angles différents. Dans Enjoy (2006) il montre des freeters, personnes sans profession stable. Freetime (2007) est une réflexion sur le travail et la liberté, abordée par le biais de jeunes gens qui ne travaillent pas. Air Conditioner, créé en 2006 et complété en 2009 par deux autres volets, Hot Pepper et The Farewell Speech, constituant un triptyque, donne à voir les relations humaines dans une entreprise à travers trois situations en apparence banales. Dans Hot Pepper des employés, pendant la pause, discutent du choix d’un restaurant pour fêter le départ d’une collègue, Erika, licenciée. Air Conditioner est un dialogue entre un homme et une femme, salariés d’une entreprise. Tandis qu’elle se plaint de la climatisation qui se dérègle, il fait des remarques sur des questions politiques et sur les politiciens qu’il a vus à la télévision.
Dans The Farewell Speech, Erika, licenciée, face à ses collègues, fait son discours d’adieu dans lequel, à travers ses inquiétudes pour son avenir et ses angoisses quotidiennes, on perçoit celles d’un pays. À l’origine de We Are the Undamaged Others : un retournement politique au Japon, le désaveu et le remplacement du parti politique au pouvoir depuis des décennies, aux élections législatives d’août 2009. Ce changement a mis au grand jour les fractures et les différences de classes qui existaient bel et bien dans la société japonaise, mais dont elle se croyait jusque-là exempte.
Toshiki Okada aborde cette fracture par le biais d’un jeune couple qui, possédant tout ce qui matériellement devrait faire son bonheur, assailli cependant par les doutes, cherche sans cesse à se convaincre qu’il est heureux. La pièce se déroule quelques jours avant et la veille du vote du 30 août 2009, où le couple reçoit la visite de Mitsuki, collègue de travail de la femme. Dans la routine autiste du quotidien des protagonistes, s’insinuent la voix d’un inconnu affirmant qu’il n’est pas heureux et insistant pour qu’ils le sachent, ainsi que les évocations des meurtres commis par un jeune homme en échec social, et du vote du 30 août révélateur du malaise profond d’une société en crise.
En recourant au motif de la variation, du collage des fragments temporels, et faisant interpréter les protagonistes par des acteurs différents, Okada réfracte ses personnages, en donne une sorte de vision cubiste, multiple, en passant ainsi du réel concret d’un couple à une vision plus générale, d’une génération.
Dans We Are the Undamaged Others, Okada va plus loin dans son interrogation de la représentation de la réalité, de ses significations possibles et de sa relation avec le langage. En procédant par variation, reprise avec des modifications, des ajouts, des précisions, des thèmes par des acteurs différents, il multiplie à la fois les unités spatio-temporelles et les points de vue.
La représentation est dénoncée d’emblée. S’adressant au public, le narrateur dit : « Permettez-moi d’expliquer de quoi parle We Are the Undamaged Others que nous nous apprêtons à jouer maintenant. Il y a un homme quelque part, cet homme est heureux, un samedi cet homme se tient là, au bord de la route. » Et le narrateur passe le relais à un autre : « C’est une autre personne qui va continuer maintenant, d’une autre façon que la mienne. »
Dans cette narration plurielle vont s’insérer, cités par les narrateurs successifs, des fragments de conversations, des réflexions des personnages, des descriptions des personnages et d’endroits différents. La narration circule dans le temps. Ainsi par exemple, le narrateur revient en arrière, citant une situation qui a eu lieu : « l’homme quelques jours plus tôt a eu cette discussion avec sa femme », ou annonce ce qui va se passer : « la femme de cet homme est cette même femme qui dans un instant va apparaître ici. Cette femme est actuellement assise sur le canapé. » Suit une description très précise du canapé et du parquet ciré de la pièce où se trouve la femme qui tout à l’heure doit apparaître.
Un temps suspendu, marqué en permanence par des indications très concrètes, précises : « aujourd’hui samedi 29 août », « le trajet de l’amie Mitsuki dure neuf minutes », « sept heures du matin du 30 août », etc., jusqu’à l’heure réelle indiquée pendant le spectacle par une horloge sur la scène.
Même type de précisions extrêmement réalistes quant aux lieux et aux objets qui n’apparaissent jamais. Sur le plateau nu, avec un grand cube blanc au centre au fond, rien n’est représenté. C’est la parole qui représente. Pas d’incarnation des personnages ni de représentation réaliste de leurs actions ou des situations. La gestuelle, les mouvements des acteurs, comme dans d’autres pièces d’Okada, sans relation directe avec le discours, mais plus condensés, donnent parfois l’impression du ressenti comme si une réaction échappait aux comédiens.
La musique, qui dans Hot Pepper est un élément dramaturgique fondamental, fait ici une apparition très discrète à deux ou trois moments. Pas ou peu d’éléments de décor dans les spectacles d’Okada. Pas de costumes, les acteurs portent des vêtements quotidiens des jeunes. Pas de projection d’images, mais parfois des formes géométriques, abstraites, lumineuses, rouges, vertes, bleues, sont projetées sur les murs ou sur le sol.
Transcender la scène Entretien avec Toshiki Okada
Irène Sadowska Guillon – Comment, pour passer au plateau votre écriture réaliste, ancrée dans le quotidien, avez vous élaboré un langage gestuel particulier, propre à votre théâtre ?
Toshiki Okada – Pour jouer mes textes, j’ai cherché avec mes acteurs une forme de jeu où les gestes, les mouvements des corps qui se laissent aller n’ont pas de rapport direct avec ce qui se dit. Une gestuelle qui en apparence n’a pas de sens. Pour moi, le geste n’est pas produit par le mot, mais il vient d’images qu’on a en soi. La relation dans l’espace de distance ou de proximité entre le langage et le corps est très importante dans mon travail. Quant au réalisme il prend chez moi un sens très différent de son acception habituelle de reproduction ou de représentation du réel. Le réel dans mes spectacles n’est pas représenté directement mais traité de telle façon que le public a l’impression de reconnaître quelque chose dans le discours et dans la gestuelle parfois exagérée des acteurs.
I. S. G. – Le triptyque (Hot Pepper, Air Conditioner, The Farewell Speech) d’une part et We Are the Undamaged Others d’autre part représentent deux directions de la recherche que vous poursuivez actuellement. En quoi consiste-t-elle ?
T. O. – Dans le triptyque, je poursuis l’exploration de la relation de la parole et du geste en amplifiant l’exagération, alors que dans We Are the Undamaged Others je cherche à aller plus loin vers l’abstraction, en interrogeant la représentation. Dans Hot Pepper, j’introduis la musique, contrainte supplémentaire qui rend plus complexe la relation entre la parole et les gestes, le rapport du corps et de la musique relevant de la danse et celui du corps au texte et à l’image du théâtre. D’où le sous-titre du spectacle, théâtre / chorégraphie. J’ai écrit pour Hot Pepper des textes dont la durée correspond à celle de divers morceaux de musique de John Cage : entre deux et trois minutes chacun. De sorte que les acteurs doivent produire des gestes à la fois par rapport à la parole et à la musique.
La seconde direction, dans laquelle s’inscrit We Are the Undamaged Others, part du questionnement du fondement du théâtre et du constat que l’acteur ne peut pas devenir le personnage qu’il est en train de jouer. Dans ce sens, le réalisme qui consiste en une recherche de l’osmose entre l’acteur et le personnage n’est qu’une illusion. D’où la question : que signifie jouer sur scène ?
J’ai compris que le public était un élément essentiel et que la représentation véritable ne se faisait pas sur scène, mais dans le spectateur. Dans We Are the Undamaged Others, j’utilise la relation entre la parole et le geste pour faire advenir autre chose, à savoir ce qui va se passer à l’intérieur du spectateur qui voit le spectacle.
À partir de là, mon écriture a changé. J’utilise des mots beaucoup plus simples dans ces textes destinés à être improvisés directement dans le spectacle. Les scènes sont improvisées au sens où tout est fixé à l’avance, mais on décide seulement trois minutes avant le spectacle quels acteurs vont les jouer. Je tiens à ce que cette ouverture à d’autres possibilités, aux variations du jeu, soit ressentie par le public.
I. S. G. – C’est par cette recherche de la transcendance de la représentation que vous vous rapprochez de Brecht ?
T. O. – D’une certaine façon, oui. Brecht a cherché une relation entre ce qui se passe sur scène et le public, comment donner un rôle actif à celui-ci. Il recourt à la distanciation et à la dialectique. Mais il n’a pas essayé de trouver une forme idéale du spectacle pour transférer la représentation dans le spectateur. Ce qui m’intéresse dans le travail théâtral, ce n’est pas de perfectionner la représentation de la pièce mais comment créer un lien entre le temps d’interprétation et le public qui est en face.
I. S. G. – Dans vos spectacles il n’y a quasiment pas de décor, pas ou peu d’objets, pas de projection d’images, mais de formes lumineuses géométriques. S’agit-il d’un renoncement à toute représentation réaliste ?
T. O. – J’essaye d’aller le plus loin possible dans l’abstraction, à la fois dans le jeu en dissociant le discours et les mouvements du corps, et dans l’espace, dépouillé au maximum de tout ce qui est figuratif, des significations précises qui amènent des images convenues, immédiatement décryptables.
Les éclairages, les projections lumineuses, les couleurs dans le triptyque participent de cette démarche. J’ai demandé au créateur de lumières, mon collaborateur de longue date, qu’il y ait une synchronisation entre les projections des couleurs, qui n’ont bien sûr ici aucune signification symbolique, les scènes et la musique.
I. S. G. – La notion du temps est un élément important dans votre travail théâtral…
T. O. – Le théâtre permet de prolonger, réduire, découper, isoler, réfracter le temps qu’on mesure d’habitude de façon chronologique. On peut manipuler le temps, avancer l’heure, ralentir le mouvement des aiguilles, etc.
Il y a divers aspects du traitement du temps dans mes pièces. Par exemple, dans Cinq jours en mars, histoire d’un couple qui s’enferme à l’hôtel pendant plusieurs jours, le temps est introduit dans la structure dramatique. C’est un temps suspendu, découpé de la réalité, de la vie quotidienne, dans lequel interviennent des éléments temporels différents.
Dans We Are the Undamaged Others, il y a divers plans temporels dans la mise en scène : des moments de temps figé, le temps qui avance, le temps de la narration et finalement le temps réel du spectacle.
I. S. G. – Dans vos pièces, des événements extérieurs, faits divers, conflits ou changements politiques, font souvent irruption dans le quotidien tranquille des protagonistes vivant dans des lieux fermés, isolés, où ils se croient protégés…
T. O. – C’est ce que je ressens profondément : la difficulté de faire la relation entre soi et ce qui se passe autour de nous, dans la société. Cette sorte de repliement, de quasi autisme, d’isolement, de refuge dans l’illusion du bonheur, de la sécurité. C’est pourquoi je m’attache à décrire ce genre d’espace découpé par rapport à la société.
I S. G. – En exploitant dans votre théâtre l’argot des jeunes, le langage parlé, quotidien, décalé du langage officiel qui impose une certaine vision de la réalité, et en recourant à une gestuelle en rupture avec les codes pseudo naturels du discours normatif, vous subvertissez, voire cassez, les normes, les conventions, le statu quo d’une société extrêmement formatée. En ce sens, peut-on qualifier votre démarche de politique ?
T. O. – Ce qui m’intéresse tout d’abord, c’est de trouver un lien entre le public et le plateau. J’essaye de contredire les normes théâtrales car je pense qu’elles empêchent la fusion du public et de la scène.
Il y a certainement dans le public des gens qui sont plus à l’aise dans la fiction de la représentation d’un théâtre codé. Le public qui m’intéresse, c’est celui qui se sent rejeté et n’arrive pas à adhérer à ce genre de théâtre normatif avec ses mises en scène et ses gestuelles conventionnelles. Le défi de mon travail est : comment sortir du processus signifiant conventionnel du corps et du langage, supprimer cet obstacle qui sépare ce public de la scène ?
D’où le choix d’un langage du corps, des gestes générés par des images, des sensations précédant les mots qui échappent aux codes, aux conventions. C’est pourquoi aussi je recours souvent à l’argot des jeunes ou à l’authenticité, la sincérité du langage simple, pauvre, de la rue. Je cherche à faire éprouver ce langage sur scène dans sa relation avec le corps.
C’est aussi une façon de mettre sur scène, dans le champ de notre vision, cette part de la société qui pendant longtemps était ignorée, invisible. En ce sens on peut considérer ma démarche à la fois comme esthétique, politique ou simplement humaine.
Actualité de Toshiki Okada
Après les représentations au Festival d’Automne à Paris, We Are the Undamaged Others est joué en tournée, à Modane et à Berlin.
Cinq jours en mars en tournée aux Philippines, Australie et Thaïlande.
La nouvelle pièce de Toshiki Okada, A Sonic Life of Giant Tortoise, sera créée en février 2011 à Yokohama.
[1] Irène Sadowska Guillon est critique dramatique et essayiste, spécialisée dans le théâtre contemporain et présidente de « Hispanité Explorations », Échanges franco-hispaniques des dramaturgies contemporaines.
Copyright © 2011 Irène Sadowska Guillon
Critical Stages/Scènes critiques e-ISSN: 2409-7411
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