Identification et performativité technologique dans Autour du Rose enfer des animaux

Thomas Langlois* et Robert Faguy**

Résumé

Cet article propose une réflexion pratique autour de l’identification du spectateur à la
« performativité des systèmes technologiques » et au « transfert performatif » (Faguy, 2014), en partie opérés par le performeur sonore Thomas Langlois dans Autour du Rose enfer des animaux (AREA), une création interactive du collectif Dans Ta Tête (DTT). AREA se veut une adaptation du Rose enfer des animaux (1958), pièce de « téléthéâtre cosmique » du poète québécois Claude Gauvreau. Nous observerons comment le dispositif technologique participe au rituel d’identification du spectateur à une vérité performative, suivant une logique d’intermanipulation entre celui-ci et le performeur sonore, où l’un se contamine de l’attitude et de l’énergie de l’autre dans une dynamique de boucles ouvertes. Nous verrons que le spectateur-performeur endosse de nombreux masques (physique, vidéo et sonore) pour assumer la convention du personnage qui lui est assigné et prendre part au jeu théâtral et performatif d’AREA.

Mots-clés : Claude Gauvreau, performativité, transfert performatif, boucles de rétroaction, intermanipulation, manipulaction, spectacteur

Il y a déjà quelques décennies, le poète et dramaturge Claude Gauvreau nous livrait la pièce Le Rose enfer des animaux (1958), dans laquelle irradiait sa langue exploréenne. Il y a quelques années, Robert Faguy pilotait une recherche-création sur les dramaturgies plurielles (FRQSC : 2014-2018) s’appuyant sur le texte de Gauvreau. Désormais une création interactive du collectif Dans Ta Tête (DTT), Autour du Rose enfer des animaux (AREA) invite le public à un grand banquet virtuel autour d’une table, terrain de jeu technologique et interactif mis au service d’une expérience déjantée et sensorielle. Cet article propose une réflexion pratique autour des différents registres d’identification du spectateur générés par la « performativité des systèmes technologiques »[1] d’AREA, ainsi qu’au rôle du performeur sonore Thomas Langlois, qui incite le spectateur à réagir et à manipuler à son tour le performeur dans une sorte de « double marionnettisation ».

La mission du collectif DTT

Organisme à but non lucratif de théâtre multidisciplinaire, le DTT désire « amener le spectacle « dans la tête du spectateur »,[2] en lui faisant vivre des expériences spectaculaires originales et interactives empreintes de ludisme. Le spectacteur,[3] ainsi placé en situation de performance, interroge le dispositif propre à chaque création du collectif et en éprouve le potentiel d’interactivité. Toutes les formes de participation du spectacteur sont donc bienvenues, qu’il s’agisse d’une action concrète et observable au cours du spectacle, ou encore du potentiel d’action que déploie son imaginaire tout au long de celui-ci et qui l’habitera bien au-delà de la seule expérience spectaculaire.[4] Le DTT table ainsi sur le potentiel de performativité de ses dispositifs scéniques, mais également sur les dispositifs psychologiques qu’il installe chez le spectacteur.

Historique d’AREA

Le Rose enfer des animaux de Gauvreau, « téléthéâtre cosmique », consiste en une véritable pièce de résistance de poésie surréaliste. Les personnages, invités par l’hôte Domitien d’Olmansay, nous apparaissent sous leurs formes animales : la chamelle Eglantine Roma-Romuhl, la mouffette Erthulia Gohiaz, le zébu Prescott Diebulian, le tapir Arsène de Haucauman, l’obus Ernest Gogott, l’éléphante Andréa Lila, la biche Vivienne Hortadek et le nymphéa Jasmin Liblua.[5] L’action se déroule surtout dans la salle du festin au palais de Domitien, mais aussi dans le jardin et dans une pièce secrète recelant des photographies de tous les convives.[6] Les échanges des personnages déploient une orgie de poésie surréaliste et un foisonnement de références artistiques, entremêlées de didascalies relatant des épisodes déjantés difficilement réalisables selon une perspective strictement théâtrale : « (Arsène de Haucauman se rapetissant dans les airs tombe à pieds joints sur le ventre du bœuf. Le ventre du bœuf le projette en haut : il disparaît : retombe dead-pan avec deux tartes à la farlouche sur le plat de chaque main maintenant bien horizontale) ».[7]

La pièce s’achève sur Domitien confronté à son propre reflet dans le miroir : réalisant sa nature de gorille, il se voit décapité par l’intrus Abilka, lequel se fait à son tour décapiter par Erthulia. Dans cette logique télévisuelle du regard, le public du Rose enfer des animaux assiste au téléthéâtre à travers les yeux de la caméra, dont le « […] regard s’identifie à celui de Domitien d’Olmansay et s’y identifiera jusqu’au moment bien précis, vers la fin du téléthéâtre, où leur séparation sera indiquée ».[8] Une didascalie notable, considérant que les exemples de longs plans séquences subjectifs n’étaient pas monnaie courante au cinéma, encore moins à la télévision des années cinquante. La dramaturgie de Gauvreau convoque ainsi une dynamique de point de vue et d’identification qui s’articule par le regard posé sur soi et sur l’autre. Cette dynamique, le DTT l’exacerbera via le dispositif interactif et la posture performative d’AREA.

Les convives à la table, celle-ci servant entièrement d’écran pour le mapping vidéo : projection animée du texte de Gauvreau. 2021. Photo : Patrice Lévesque

En 2015, Faguy entreprenait un projet recherche-création universitaire intitulé Autour du Rose enfer des animaux, qui employait l’œuvre de Gauvreau comme matière de création mise au service de ses enjeux de recherche, lesquels visaient à éprouver un logiciel d’aide dramaturgique pour une écriture scénique plurielle et complexe. Son projet terminé, il offrit au DTT de s’approprier AREA afin d’en réaliser une production artistique en milieu professionnel. S’inspirant de sa propre démarche artistique et du dispositif initialement développé par Faguy et son équipe, le DTT se lança dans une création désireuse de rendre hommage à l’univers et à la langue poétique de Gauvreau. Jusqu’à présent, AREA ne fut présenté qu’en format de laboratoire : une première fois au Festival de Théâtre de l’Université Laval (Québec, 2018), puis au Carrefour international de théâtre (Québec, 2018), à PHOS (Matane, 2019), puis en ligne au Mois Multi (Québec, 2021). AREA propose une adaptation interactive de la pièce originale : en résumé, huit spectateurs masqués, assumant tous les rôles des convives de Domitien, s’assoient autour d’une immense table afin de prendre part à un banquet visuel et sonore. La surface de la table consiste en une immense plaque de plexiglas recouverte d’un drap blanc, sur laquelle sont posés des accessoires (ex. : fausse nourriture, racines, carrousel, coquilles, etc.) qui servent d’écrans multiples.

À l’aide du mapping vidéo, de nombreuses animations dévoilent l’univers visuel de Gauvreau. De plus, un castelet électronique, dont les modules sont répartis sous la table, permet d’animer certaines composantes du décor. Devant chaque spectateur, une assiette-moniteur diffuse à son intention quelques images de repas, ainsi que des consignes d’actions à réaliser (ex. : trinquer, se caresser). Les ustensiles, connectés à un système Makey Makey, activent différents sons qui émanent de la table lorsque touchés par les spectateurs à certains moments précis du spectacle. À ce système s’ajoute une caméra de captation en direct qui, faisant office de valet, se meut au-dessus des têtes des spectateurs à l’aide de câbles motorisés. Domitien, quant à lui, consiste en une marionnette robotisée au regard double : une lentille de caméra miniature dans le premier œil et une autre de projecteur vidéo dans le deuxième, le tout recouvert d’un énorme masque de gorille en carton de style origami. Enfin, la dramaturgie d’AREA propose un découpage des thèmes majeurs de la pièce initiale : sous la forme d’un repas sur plusieurs services, le spectateur « savoure » une suite de scènes, de « modules » construits à partir des thématiques du texte de Gauvreau.

Réalité augmentée : intégration de médias (ici, des volants de voitures) dans la retransmission vidéo du regard de Domitien (4 moniteurs au centre de la table) lors de la séquence de la course de taxis. 2021. Photo : Patrice Lévesque
Rituel d’identification et prise de possession du personnage : un triple masque

Le processus d’identification du spectateur s’inscrit d’abord dans un système de conventions dramaturgiques. Ultimement, ce processus d’identification se déploie en un rituel initiatique complet, où une hôtesse sélectionne, parmi le bassin du public en attente d’entrer en salle, les huit spectateurs destinés à jouer les convives animaux à la table. Le rituel d’identification et de prise de possession du personnage se réalise ensuite par l’intégration de trois conventions de masques bien distinctes.

Le masque physique

Chaque invité entre en scène et trouve sa place à la table, sous le regard du reste du public n’ayant pas été choisi et qui, pour sa part, se trouve assis dans les gradins s’élevant de chaque côté de la table. L’invité revêt alors le masque physique entièrement blanc du personnage-animal qui lui a été attribué, non sans avoir établi avec lui un premier contact visuel : il en constate la nature, développe avec lui une première relation d’intimité avant de l’endosser publiquement, sur scène. Par ce rituel, les spectateurs-table se voient attribuer les rôles de performeurs au vu et au su du reste des autres spectateurs. Saisissons bien ici l’ampleur du contrat performatif[9] auquel consent le spectateur assis à la table du moment qu’il endosse le masque physique : il se lance dans une performance publique en continu sur une durée pouvant potentiellement s’étirer jusqu’à une heure trente, suivant une partition qui lui est inconnue !

Le masque vidéo

Le spectacle s’ouvre ensuite sur de courts échanges lors desquels Domitien salue et désigne chacun des convives par le nom de son personnage. Ceux-ci observent à tour de rôle leur propre image retransmise en direct dans des moniteurs installés au centre de la table. Or, cette image se voit augmentée grâce à un effet d’incrustation par lequel, au blanc du masque animal, se substituent des filtres numériques rappelant la texture de peau de chacun des personnages-animaux. Le spectacteur prend ainsi conscience que chaque personne assise à la table, de même que les spectateurs dans les gradins, observent ce transfert d’animalité grâce à l’image vidéo. Au cours de la représentation, d’autres modifications du masque vidéo ont lieu avec le même procédé de réalité augmentée ; par exemple, le personnage d’Erthulia se transforme éventuellement en chauve-souris vampire ! L’intérêt du masque vidéo, s’ajoutant au masque physique, est qu’il agit directement sur la psyché du spectateur qui le porte : même s’il ne voit plus le masque une fois qu’il l’a endossé, il sait qu’on y projette quelque chose et, l’espace d’un instant, cette projection l’amène à douter de sa propre identité, lui faisant adopter, de façon très éphémère, la condition dramaturgique du personnage.

Le masque sonore

En simultané à ce masque vidéo s’ajoute un masque sonore : en effet, chacune des voix des personnages a été au préalable minutieusement modulée à partir d’une petite console TC Helicon Voicelive Touch 2, de sorte à l’habiller d’un grain unique. À chaque personnage est ainsi attribuée une voix distincte : l’hôte Domitien d’Olmansay, le valet (personnage créé par le collectif), l’intrus Abilka (personnage suggéré comme étant dissimulé sous la table, dont la représentation dans AREA est davantage conceptuelle) et, bien sûr, les huit convives autour de la table, personnages-animaux joués par les spectateurs-table. Ainsi, au masque physique que doit porter le spectateur, puis au masque vidéo se superposant par moments à celui-ci, s’ajoute le masque sonore qu’impose le dispositif technologique, soit le grain artificiel de la voix associée à son personnage, constitué d’une distorsion numérique du timbre naturel du performeur.

Ces trois masques agissent en fragments complémentaires et concourent ainsi à l’intégration totalisante de la convention dramaturgique du personnage, endossé dans sa matérialité, son apparence figurative visuelle et son unicité sonore. Combinés, ces masques induisent simultanément plusieurs clés de jeu au spectateur : une attitude corporelle (masque physique), une condition imaginaire (masque vidéo) et un état affectif (masque sonore). À cette triple convention s’ajoutent les consignes d’actions que suggèrent par moments les moniteurs installés devant le spectateur, lesquelles apparaissent au centre de son assiette. L’intégration successive des trois masques, combinée aux consignes d’action, participent donc à un rituel d’identification progressive du spectacteur à la convention du personnage qui lui est assigné.

Un dispositif sonore performatif

Avec AREA, le collectif dépasse le cadre initial du téléthéâtre et adopte une posture performative. Celle-ci se manifeste, d’une part, à travers le dispositif, véritable terrain de jeu mêlant technologie sonore, vidéo et robotique, qui potentialise l’interactivité du spectateur (consignes des moniteurs et activations sonores au contact des ustensiles). D’autre part, malgré la rigidité qu’impose a priori la programmation technologique à la structure du spectacle, les concepteurs sonores et visuels s’octroient une latitude de performeurs en opérant certains éléments en direct. Voici un portrait synthétique du dispositif sonore performatif : surplombant la table des convives, le performeur Thomas Langlois improvise vocalement les atmosphères sonores associées aux différentes séquences du spectacle, à partir de canevas de boucles et d’effets numériques prédéterminés dans le logiciel Live d’Ableton,[10] qui musicalisent sa voix. Ces boucles sonores sont parfois appuyées de quelques notes de clavier, elles aussi modulées par Live. En parallèle, dans un deuxième micro, le performeur livre les répliques de l’ensemble des personnages de l’œuvre. En activant chacune des voix traitées, il en détermine du même coup la direction, parmi les petites caisses de son faisant office d’appuie-tête disposé derrière chaque spectacteur. En plus de renforcer l’identification de celui-ci par cette proximité physique du son de la voix, qui lui donne l’impression d’émaner de sa propre tête, ce dispositif permet de cibler aisément la provenance des différentes voix dans l’espace, de sorte à attirer instantanément l’attention des autres spectacteurs. De cette manière, dans une logique d’homme-orchestre, le performeur sonore donne à entendre, à lui seul, les voix de l’ensemble des personnages.

Le performeur sonore (Thomas Langlois) décrit un personnage-animal selon les didascalies de Gauvreau. 2021. Photo : Patrice Lévesque
Manipulations et transfert performatif

Les bases du dispositif sonore posées, il convient de rendre compte du rapport de manipulation s’effectuant du performeur sonore au spectacteur assis à la table, et vice-versa. Alors qu’il livre les répliques des différents personnages, le performeur doit maintenir une attitude d’écoute sensible de sorte à se laisser contaminer par l’attitude corporelle du spectacteur. Cette influence, qui joue à la fois sur des registres formels (posture physique et gestualité…) et énergétiques (mouvements, intensité…), pousse le performeur à moduler sa voix en fonction des différentes actions posées par les convives. En contrepartie, le spectacteur se laisse à son tour contaminer de l’énergie que le performeur lui transmet par sa voix. Ce jeu d’altération de l’attitude physique se manifeste particulièrement lorsque le performeur sonore lui donne les répliques de son personnage, l’exemple récurrent étant une gesticulation exacerbée, outrancière. Dans le cas où le spectateur prend conscience de cette convention performative et réalise son pouvoir d’influence sur l’expressivité même du performeur sonore, un transfert performatif[11] peut se réaliser, dans la mesure où les actions de l’un sont influencées par celles de l’autre. Le masque sonore, par l’unicité de son grain, conditionne ainsi la manière de livrer le texte du performeur (attitude corporelle et vocale, énergie, ton, diction, vitesse, rythme, etc.) et, par conséquent, contamine aussi l’attitude corporelle du spectateur.

Dans ce système de communication, il convient d’appeler « boucles de rétroaction »[12] le mouvement d’allers-retours qui potentialise ce type de dérapages ludiques. Pour être opérantes, ces boucles nécessitent toutefois d’établir au préalable une convention de jeu, d’écoute, de confiance, de défi – se défier soi-même afin de défier l’autre – au sein de la dynamique relationnelle du performeur et du spectacteur. Ce travail de manipulation du spectacteur fait du performeur un manipulacteur,[13] puisqu’elle l’inscrit dans une logique de marionnettisation. Dans le cas d’AREA, cette manipulaction se déploie jusqu’à l’intermanipulation, étant donné que dans cette logique de boucles de rétroaction, les opérations du manipulacteur l’amènent à se faire, à son tour, manipuler par celui qu’il marionnettise. Le masque sonore possède donc en outre une fonction utilitaire, mais essentielle : par son entière prise en charge des modulations artificielles des voix, il dégage le performeur de la charge de travail d’interprétation musicale de celles-ci, lui permettant de centraliser son attention sur les dynamiques des boucles de rétroaction. Autrement dit, puisqu’il n’a pas à moduler lui-même les effets vocaux de chaque personnage, il est plus à même de prioriser une écoute active des comportements du spectateur, de sorte à travailler les subtilités de la vérité de situation et d’action qu’il installe avec eux.

Photo : Patrice Lévesque

On assiste alors souvent à un jeu de surenchères où le spectateur-table, en réaction aux modulations vocales du performeur, s’emballe à son tour, stimulant de nouvelles surenchères chez le performeur et ainsi de suite. Dans le cas où le spectacteur se déchaîne dans cette logique dite positive et se laisse aller à ce jeu, par exemple en se trémoussant et en gesticulant, le performeur sonore tente de s’adapter du mieux qu’il le peut. Il dilate alors la durée allouée à cette séquence dans la partition et joue avec le spectacteur, de sorte à faire durer aussi longtemps que possible cette relation de surenchère qu’ils co-construisent ensemble. Il veille alors à ne pas l’étirer jusqu’à épuiser l’effet de vivacité qu’elle provoque, sous peine de tomber dans une performance excessive qui aurait pour effet de nuire à la connexion qu’il cherche à établir avec les spectacteurs.

En raison de son potentiel d’action sur le performeur sonore, l’identification du spectacteur ne s’applique donc pas seulement à la convention dramaturgique de personnage (installée dès le rituel d’entrée), elle s’étend également à la performativité même du système technologique. Cette interface lui permet de poser les bases d’un rapport intime avec le performeur sonore, son partenaire de co-construction des boucles de rétroaction. Ce système interactif pousse donc le spectateur à adopter une posture paradoxale : s’il s’identifie de façon ludique et conceptuelle au personnage de la pièce qui lui est attribué, il préserve néanmoins un certain décalage sensible avec lui, puisqu’il interagit moins avec l’imaginaire dramaturgique de l’œuvre qu’avec le système technologique du dispositif. À travers ce processus de marionnetisation performative à deux voies, performeur et spectateur ne se contentent pas de jouer avec un simple système interactif ; ils en expérimentent les limites, provoquent des tensions afin d’élargir le potentiel d’action inhérent à celui-ci.

Photo : Patrice Lévesque

La variabilité des publics, une condition au transfert performatif : à chaque microsociété, ses normes de conduite

Plusieurs conditions mises en œuvre dans AREA permettent de réaliser un tel transfert performatif. L’une de celles-ci, essentielle dans cette logique interactive, est la prise en compte de la variabilité des publics. Les spectacteurs assis à la table établissent des rapports qui définissent leur microsociété mise en spectacle et ces dynamiques internes se renouvellent à chaque représentation d’AREA. Le performeur sonore, même s’il opère à partir d’une partition textuelle prédéterminée, doit nécessairement s’adapter à cette fluctuation du niveau d’énergie et de participation propre à chaque public. Il lui faut d’abord une première phase d’ajustement et d’écoute des signes que lui renvoient les spectacteurs dès le début du spectacle, de sorte à cerner le potentiel d’interactions avec le dispositif. Il cherche ensuite, dans l’ici et maintenant de sa performance, à proposer, adapter ou même renouveler ses stratégies d’interaction avec les spectacteurs (dans le cas, par exemple, d’un public en apparence passif), de sorte à stimuler leurs réactions à l’aide du dispositif technologique. En effet, s’il y a identification du spectateur à la performativité du système, c’est qu’il y trouve une vérité à laquelle s’accorder : le performeur sonore ne vise donc pas l’atteinte d’une vérité expressive selon une logique d’interprétation psychologique – pour ne pas dire stanislavskienne – du texte, mais bien à installer, partager et développer une vérité de situation et d’action avec les personnes présentes autour de la table. Cette vérité doit également se manifester dans la profération du texte par le performeur qui s’attarde moins au sens intellectuel des mots qu’à leurs textures, leurs rythmes, leur potentiel de contorsions sonores, éléments qui résonnent tous avec le ludisme et la force vivifiante de la parole poétique de Gauvreau.

La suggestion d’attitudes corporelles par la musicalité des voix

À cette intention de véracité qui sous-tend l’entreprise de co-construction du performeur sonore s’ajoutent certaines contraintes, engendrées par le traitement musical des voix artificielles des différents personnages. Chaque voix augmentée donne à entendre une musicalité qui la démarque des autres. Les plus évidentes sont celles de l’obus Ernest Gogott et de la mouffette Erthulia Gohiaz : la première, chargée d’un bourdonnement grave d’insecte, impose une diction plus lente du texte chez le performeur et témoigne, à l’écoute, d’une sensation se rapprochant d’une singulière perversité. La seconde, au contraire très aigüe, porte un effet qui rappelle les variations d’intervalles sonores que permet le processeur Autotune, offrant ainsi au performeur la possibilité d’exploiter les extrêmes d’une musicalité fluette, le tout dans une sensation de légèreté aérienne, de frivolité survoltée. La fonction première de ce traitement de la voix consiste à délivrer et à faire honneur à la musicalité et au ludisme de la poésie de Gauvreau. Combiné aux jeux de modulations naturelles de la voix du performeur, le grain numérique unique à chaque personnage invite le spectacteur à s’investir d’une attitude-type qui module son attitude corporelle. À titre d’exemple, on verra le spectateur-Erthulia développer une gestuelle presque dansée, le performeur se laissant quant à lui contaminer tout au long du spectacle par les multiples attitudes corporelles qu’induisent à son égard les voix traitées.

La double identification du spectateur dans les gradins

En dehors de la seule expérience du spectacteur assis à la table, le dispositif d’AREA provoque un tout autre type de transfert performatif : alors que le spectateur-table traverse un processus d’identification conceptuelle et dramaturgique à son personnage animalesque, le spectateur-gradin, quant à lui, développe envers celui-ci une identification que l’on pourrait qualifier d’empathique. En effet, dès la prise de possession du masque par le spectacteur à la table au tout début du spectacle, le spectateur dans les gradins entame ce processus d’identification qui ne repose pas sur la convention du personnage soumis à des situations dramaturgiques, mais bien sur la situation performative de l’individu devenu spectacteur. Il s’y projette, réalisant bien vite que ce dernier n’est aucunement complice de la partition scénique à venir et conscient qu’il aurait très bien pu lui-même occuper ce rôle. À travers les actions qu’il pose à la table, donc, la posture performative du spectacteur exacerbe l’empathie qu’entretient le spectateur-gradin à son égard. Ce dernier s’imagine à loisir tout ce qu’il ferait s’il se trouvait à sa place, il projette en lui un potentiel d’action performatives virtuelles. Cette autre logique de transfert performatif s’inscrit bien sûr dans cette la démarche artistique du DTT, qui cherche à amener le spectacle dans la tête de chaque spectateur, à lui suggérer des éventualités qu’il choisit ou non d’adopter, à le faire rêver des possibles qui s’offrent à lui.

En ce qui concerne l’expérience du spectateur-gradin, un deuxième mécanisme d’appropriation du dispositif communicationnel s’ajoute, qui porte cette fois vers le performeur sonore lui-même : on parle ici d’une identification globale. Il arrive en effet qu’à l’insu du spectacteur attablé, l’éclairage ambiant montre le performeur sonore en plein travail, effectuant ses diverses manipulations avec le système technologique.[14] Le spectateur-gradin le voit donc lever le doigt, choisir un bouton sur son clavier afin de sélectionner la voix appropriée, puis gesticuler et se contorsionner afin de jouer avec le spectacteur. Il est également témoin d’une portion importante d’actions réalisées par les spectacteurs à la table et peut se questionner à savoir si, comme lui, le performeur les a remarquées, et s’il y répondra. Du coup, il réalise, contrairement au spectacteur, que malgré le fait que la partition du spectacle soit précise, son exécution, elle, demeure flexible, puisque performée dans cette logique de boucles de rétroaction. Le spectateur-gradin développe ainsi une vision globalisante du système technologique et peut se projeter à la place du performeur sonore, s’imaginer s’amuser lui-même avec le dispositif technologique afin de jazzer, à son tour, la relation établie avec le spectacteur. AREA table donc sur un théâtre expérientiel, dont la posture spectatorielle fait que tout se joue dans l’ici et maintenant, selon ce double point de vue impliquant une identification empathique face au spectacteur ainsi qu’une identification performative face au manipulacteur. À travers les mécanismes d’identification à la convention dramaturgique du personnage animal (spectateur-table) et d’identification transposée (le spectateur-gradin qui se projette de façon empathique dans le spectateur-table, sachant qu’il aurait pu, lui aussi, être acteur d’un soir), le théâtre alternatif du DTT remet en cause le rôle du spectateur traditionnel.

Une dynamique de la transformation

Ultimement, ces processus d’identification du spectateur s’inscrivent dans une dynamique de la transformation, ligne de force de l’œuvre de Gauvreau, à commencer par la nature même du personnage de Jasmin qui, selon la description qu’en donne le poète, consiste tout au long de la pièce en « […] un nymphéa se transformant en singe schnozzle (il est les deux alternativement) ».[15] Cette transformation se réalise, d’une part, à partir des mécaniques intrinsèques au repas : à l’image des nombreuses didascalies de Gauvreau, les conceptions vidéo et sonore altèrent l’environnement de la table de façon continue, vers une montée progressive du délire automatiste. D’autre part, cette transformation s’opère également par l’adhésion progressive du spectateur-table à la convention du personnage qu’on lui attribue, puis lors des boucles ouvertes, qu’il co-construit dans une dynamique d’intermanipulation avec le performeur : il transforme bientôt son attitude corporelle, ses interactions, sa posture (de spectateur à performeur) et sa sensation profonde d’être en scène. L’interface sonore des voix de synthèse, malgré qu’il s’agisse d’une technologie désormais simple et admise, permet une rencontre conceptuelle et sensible des entités physiquement distinctes que sont le performeur et le spectacteur. Conceptuelle, dans la mesure où c’est par l’identification du spectateur à la vérité performative qu’il entre en contact avec le performeur. Sensible, puisque, dans une dynamique de boucle de rétroaction, l’attitude de l’un contamine la corporalité de l’autre. Par conséquent, via l’identification à la vérité performative que permet le dispositif, le corps du performeur devient, par extension, celui du spectacteur et vice-versa, dans une dimension d’unité de sensibilité corporelle qui participe à la dynamique de transformation.

Sans prétendre qu’il s’agit d’un travail de la corporalité du performeur se revendiquant d’une approche meyerholdienne du jeu de l’acteur ou encore de la méthode des actions physiques de Stanislavski, il reste que l’attitude corporelle du spectacteur induit celle de la voix et vice-versa. Tout comme l’avançait Meyerhold, c’est l’attitude corporelle (et, par extension ici, l’action) qui stimule l’affectivité intérieure de l’interprète[16] – soit le performeur sonore et le spectacteur, l’un devenant l’interprète de l’autre, en ce sens où chacun tente de décoder et interpréter les signes de l’autre afin d’actualiser son propre jeu – et non l’inverse, comme le suggérait initialement la méthode de la mémoire affective de Stanislavski. Les éléments extérieurs à la relation performeur/spectacteur concourent également à faire de chacun l’extension corporelle de l’autre : leur identification commune à la situation performative (faire exister une convention de personnage), leur participation complice à la microsociété ainsi créée autour de la table et, plus important encore, les effets de surenchère qu’amène la dynamique de contamination, tant au niveau des boucles de rétroaction que des actions posées entre les spectateurs attablés.

Les personnages-animaux trinquent ensemble. 2021. Photo : Patrice Lévesque

En effet, au-delà de la convention du personnage, le spectateur-table s’identifie plus profondément encore au rôle qu’il joue comme performeur. Ce dernier processus d’identification s’observe notamment lorsqu’un spectacteur se donne en spectacle davantage que les autres (ex. : gesticulations exagérées). S’ensuit souvent une logique de surenchère : le spectacteur qui aura vu un autre spectacteur s’en donner à cœur joie lors d’un « solo » s’avère plus susceptible d’appréhender le moment venu où, à son tour, il deviendra le centre d’attention et, ce faisant, d’envisager son potentiel d’actions performatives. Autrement dit, il suffit qu’un seul des pairs de cette microsociété se démarque par son volontarisme pour stimuler une pression de performance et, ainsi, attiser la surenchère et alimenter chez chacun la conscience, le souci de son propre jeu ! Au final, le spectacteur d’AREA traverse un rituel initiatique (immersion dans un univers poétique riche, intégration successive des trois masques de son rôle, réception de consignes d’actions, co-construction d’une relation de boucle rétroactives avec le performeur sonore, établissement d’une microsociété) qui l’amène d’abord à comprendre la mécanique interactive en place, puis à opérer un processus d’identification à son rôle performatif grâce au transfert performatif que magnifie le dispositif technologique.


Notes de fin

[1] Robert Faguy, « De la performativité des systèmes techniques », dans Doute et inventivité : récits de recherche-création pour une scène indéterminée, revue Aparté, no 3 (2014), p. 54 à 60.

[2] Collectif dans ta tête, « À propos du collectif », dans Collectif dans ta tête, site internet [en ligne] (site consulté le 31 mars 2022).

[3] « Le mot spectacteur est un mot-valise contractant le mot spectateur et le mot acteur. Le spectacteur est un spectateur-acteur de l’œuvre interactive. Il est à la fois l’observateur du récit, celui pour qui le récit est dit ou montré, et le protagoniste du récit, celui par qui le récit se joue ». Réjean Dumouchel, « Le Spectacteur et le contractile », dans Cinéma, nouvelles technologies : Nouveau cinéma ?, revue Cinémas, vol. I, no 3 (1991), p. 38 à 60 [en ligne], p. 38 à 60 [en ligne] [site consulté le 31 mars 2022].

[4] Collectif dans ta tête, « À propos du collectif », dans Collectif dans ta tête, site internet [en ligne] (site consulté le 31 mars 2022).

[5] Claude Gauvreau, « Le Rose enfer des animaux », dans Œuvres créatrices complètes, Canada, Éditions Parti pris, 1977, p. 757.

[6] Idem, p. 759.

[7] Idem, p. 807.

[8] Idem, p. 760.

[9] « Si le contrat spectaculaire appelle à regarder l’acteur en scène (ses compétences d’expression vocale et corporelle, sa présence), si le contrat théâtral appelle à regarder et à prendre en considération le personnage en scène (l’expression de son statut, de ses émotions, de ses dilemmes moraux…), le contrat performatif met plutôt l’accent sur l’action elle-même. » Robert Faguy, « De la performativité des systèmes techniques », dans Doute et inventivité : récits de recherche-création pour une scène indéterminée, revue Aparté, no 3 (2014), p. 57.

[10] Avec l’assistance du concepteur sonore Thomas Rieppi.

[11] « La question est de savoir comment transférer au spectateur […] cette capacité performative des systèmes technologiques [dans une logique d’interaction]. […] il s’agit de créer des zones de tension où l’action “ machinique ” réagira à celle d’un “ acteur ”. »  Robert Faguy, « De la performativité des systèmes techniques », dans Doute et inventivité : récits de recherche-création pour une scène indéterminée, revue Aparté, no 3 (2014), p. 55. Dans AREA, la voix traitée du performeur agit comme un média étant donné que le spectacteur n’a pas accès directement à la présence du performeur sonore. Le transfert opère dans la mesure où le spectacteur prend un plaisir à tester le potentiel d’action-réaction du « système » associé aux voix.

[12] Dans les théories systémiques de la communication, les boucles de rétroaction se font de manière positive lorsque le système s’emballe jusqu’à provoquer son explosion ou négative lorsqu’on essaie de ramener l’état d’un système à un niveau d’équilibre stable. Et selon Watzlawick, cette forme de communication par rétroaction (feedback) se fait dans un mode multi-canal (geste, posture, ton de voix, etc.). Paul Watzlawick, Janet Helmick Beavin et Don D. Jackson, Une logique de la communication, Éditions du Seuil, (coll. Points), 1979, 280 p.

[13] « La notion de manipulacteur, que recouvre le néologisme construit par Annie Gilles (1994) à partir des mots manipulateur et acteur, est parfaitement adaptée aux ambitions et exigences esthétiques du théâtre de marionnettes contemporain qui, de façon consciente, exige aujourd’hui de ses artistes-interprètes une habileté de jeu intégrant à part égale le contrôle de la gestuelle de la marionnette et la maîtrise de la parole qu’on lui prête. » Patrice Freytag, « Le manipulacteur », dans « Prolégomènes à une théorie générale du théâtre de marionnettes », thèse de doctorat, Québec, Université  Laval, 2004, Québec, p. 97 [en ligne] [site consulté le 31 mars 2022].

[14] Il s’agit là des fondements de la question de recherche de la doctorante Andrée-Anne Giguère : La manipule-action de la technologie comme approche performative de la scène (thèse en cours à l’Université Laval sous la direction de Robert Faguy). À la maîtrise, elle en énonçait déjà les prémisses : « Autant la technologie devient un élément sensible et vivant du projet, autant son manipulateur prend une place importante. […] La sensibilité du manipule-acteur présent sur la scène et sa bonne connaissance technique facilite les rencontres […]. Selon moi, la manipule-action, c’est l’action scénique qui induit une présence autre à la technologie, car elle est d’abord contaminée par la présence du manipulateur. » Andrée-Anne Giguère, « Le perfectionniste en tant que manipule-acteur », dans « Relations dialogiques et performatives entre l’acteur-performeur et l’image vidéo projetée sur scène », mémoire, Chicoutimi, Université du Québec à Chicoutimi, 2012, p. 63 [en ligne] [site consulté le 31 mars 2022].

[15] Claude Gauvreau, « Le Rose enfer des animaux », dans Œuvres créatrices complètes, Canada, Éditions Parti pris, 1977, p. 758.

[16] « L’exemple [que William James, dans La théorie de l’émotion, 1903] citait à ce propos pour rendre la théorie plus compréhensible est fameux. Son “ Je vois un ours, je cours et j’ai peur ” allait connaître une grande fortune auprès des adeptes de la biomécanique. S’il est vrai en effet que l’émotion résulte de la perception d’une modification sensorielle mettent en jeu le système sympathique […], alors il devient possible d’imaginer que des corps bien entraînés, exécutant dans un contexte fictif précis une action physique donnée […] en viennent à ressentir les émotions liées à cette action. » Christine Hamon, « Théories du jeu et découvertes scientifiques au début du XXe siècle : les recherches de Stanislavski et Meyerhold à la lumière des travaux des psychologues français et américains », dans La Revue Russe, Persée, no 29 (2007), p. 95 [en ligne] [site consulté le 31 mars 2022].


Bibliographie

Collectif dans ta tête, « À propos du collectif », dans Collectif dans ta tête, site internet [en ligne] (site consulté le 31 mars 2022)

Dumouchel, Réjean, « Le Spectacteur et le contractile », dans Cinéma, nouvelles technologies : Nouveau cinéma ?, revue Cinémas, vol. I, no 3 (1991), p. 38 à 60 [en ligne] (site consulté le 31 mars 2022)

Faguy, Robert, « De la performativité des systèmes techniques », dans Doute et inventivité : récits de recherche-création pour une scène indéterminée, revue Aparté, no 3 (2014), p. 54 à 60.

Freytag, Patrice, « Prolégomènes à une théorie générale du théâtre de marionnettes », thèse de doctorat, Québec, Université  Laval, 2004, 303 p. [en ligne] (site consulté le 31 mars 2022)

Gauvreau, Claude, « Le Rose enfer des animaux », dans Œuvres créatrices complètes, Canada, Éditions Parti pris, 1977, p. 755 à 836.

Giguère, Andrée-Anne, « Relations dialogiques et performatives entre l’acteur-performeur et l’image vidéo projetée sur scène », mémoire, Chicoutimi, Université du Québec à Chicoutimi, 2012, 88 p. [en ligne] (site consulté le 31 mars 2022)

Hamon, Christine, « Théories du jeu et découvertes scientifiques au début du XXe siècle : les recherches de Stanislavski et Meyerhold à la lumière des travaux des psychologues français et américains », dans La Revue Russe, Persée, no 29 (2007), p. 91 à 100 [en ligne] (site consulté le 31 mars 2022)

Watzlawick, Paul, Janet HELMICK BEAVIN et Don D. JACKSON, Une logique de la communication, Éditions du Seuil, (coll. Points), 1979, 280 p. 


*Thomas Langlois. Créateur tant multidisciplinaire qu’indiscipliné, Thomas Langlois pratique la poésie orale (slam), l’art multidisciplinaire et le théâtre. Outre son parcours de créateur en milieu artistique, il est également titulaire d’un baccalauréat en théâtre, puis d’une maîtrise à l’Université Laval, où il a développé la théâtralisation du slam de poésie par l’intégration de la biomécanique meyerholdienne, alors soutenu par une bourse du CRSH. Il y poursuit actuellement des études doctorales sur le jeu cabotin, pour lesquelles il a été soutenu par une bourse de doctorat en recherche du FRQSC. Il est également cofondateur et cocréateur actif du collectif Dans Ta Tête (DTT). 

**Robert Faguy. Professeur de théâtre à l’Université Laval, Robert Faguy œuvre depuis 40 ans dans le domaine de la création artistique multidisciplinaire. Détenteur d’un doctorat sur les diverses utilisations de la vidéo à la scène, il a coécrit avec Ludovic Fouquet le livre Face à l’image : exercices, explorations et expériences vidéoscéniques (2016). Directeur du LANTISS (Laboratoire des nouvelles technologies de l’image, du son et de la scène), ses projets de recherche-création visent le développement d’outils numériques adaptés à une dramaturgie dite plurielle de même qu’à son archivage. Depuis 2006, il collabore en tant que performeur avec le Bureau de l’APA.

Copyright © 2022 Thomas Langlois and Robert Faguy
Critical Stages/Scènes critiques e-ISSN: 2409-7411

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